30 Déc, 2015
Texte tiré de l’ouvrage : PROTAIS LUMBU 4. «Mon apport dans le Triomphe de la démocratie multipartiste’ »
Je me rappelais certains moments de ma vie où pour arriver à mes objectifs, j’avais du me faire violence en acceptant de m’humilier. Ce fut le cas à Sola à la fin de mes études primaires en 1961 et à l’université nationale du Zaïre, campus de Kinshasa en mars 1974, après mon renvoi lors des journées de réflexion de janvier 1974 alors que j’étais le Secrétaire Dirigeant de la JMPR/Campus Universitaire de Kinshasa. Je pris un morceau de papier hygiénique et écrivis dessus ce qui suit :
LUMBU MALOBA NDIBA Kalemie le 11 mai 1987.
A KALEMIE
Objet : l’éponge sur le passé.
Citoyen Président Fondateur
L’entretien que nous avons eu à Gbadolite, le 21/03/87 m’a permis de méditer dans mon cachot sur mes deux responsabilités ; celle envers mon pays et celle envers ma famille.
Envers mon pays : Exclu du Conseil Législatif suite à la lettre ouverte, j’ai fondé avec mes collègues l’UDPS (Union pour la Démocratie et le Progrès Social), dans l’objectif de continuer à faire entendre ma voix, sur la nécessité de la démocratisation de notre Pays.
Pour cela, je suis en détention depuis plusieurs années et empêché de remplir ma responsabilité envers ma famille.
A l’occasion de l’entrée du MPR, dans sa 21 è année ; l’âge dont l’adolescence cède à la maturité : je vous demande de passer l’éponge sur le passé et de m’offrir les nouvelles chances de remplir respectivement mes deux responsabilités.
Veuillez croire, citoyen Président, à l’expression de mes sentiments les plus respectueux.
Signé/ Maître LUMBU MALOBA NDIBA
J’avais demandé au militaire de garde à remettre à l’officier des renseignements cette note. Ce dernier ne tarda pas à me rencontrer pour me dire que le Commissaire Sous Régional allait venir s’entretenir avec moi. Au bout de près d’une heure, je fus en pyjama extrait du cachot pour le bureau du colonel que je trouvai en compagnie du Commissaire Sous Régional.
Il me fut remis des papiers ministres afin que je puisse reproduire ma lettre parce que le Gouverneur qui avait déjà été mis au courant l’attendait, ce que je fis. Me Moupondo me reçut encore le lendemain matin toujours au bureau du colonel, pour m’informer que le Gouverneur avait été en contact avec le Président de la République mais que celui-ci ne voulait pas que sur ma note figure les mots, cachot et détention. Après avoir enlevé ces deux mots, il revint pendant la journée d’abord pour réclamer l’ajout de la phrase « abandonner mes activités dans l’UDPS » et puis pour faire mentionner que « mes deux responsabilités je devais les remplir au sein du MPR », et enfin une personne que je ne connaissais pas m’avait remis pour signature une lettre faite à mon nom. Cette note me faisait renier tout mon passé.
Je refusais de la signer en lui disant que j’étais arrivé à ma limite avec toutes les retouches déjà faites à ma lettre déjà en leur possession, cette personne partit sans insister. Ci –dessous le contenu définitif de ma note au Président Mobutu :
LUMBU MALOBA NDIBA Kalemie, le 13/05/1987.
A Kalemie
Objet : l’éponge sur le passé. Au Président Fondateur du MPR
à Kinshasa.
Citoyen Président Fondateur,
L’entretien que nous avons eu à Gbadolite le 21/03/87 m’a permis de méditer sur mes deux responsabilités, celle envers mon pays et celle envers ma famille.
Envers mon pays, Exclu du Conseil Législatif suite à la lettre ouverte, j’ai fondé avec mes collègues, l’UDPS (Union pour la Démocratie et le Progrès Social), dans l’objectif de continuer à faire entendre ma voix sur la nécessité de la démocratisation de notre pays, ce qui m’amena dans des situations qui m’ont empêché de remplir ma responsabilité envers ma famille.
A l’occasion de l’entrée du MPR, dans sa 21e année ; l’âge dont l’adolescence cède à la maturité, j’ai décidé d’abandonner mes activités dans l’UDPS et vous demande de passer l’éponge sur le passé et de m’offrir les nouvelles chances de remplir respectivement mes deux responsabilités au sein du MPR.
Veuillez croire, citoyen Président, à l’expression de mes sentiments les plus respectueux.
Signé/Maître LUMBU MALOBA NDIBA
Ma nouvelle position avait entraîné directement l’allégement de mes conditions de détention. Mon épouse qu’un message avait invité à me rejoindre immédiatement pour m’apporter son soutien m’avait trouvé dans cet état. Autorisée à me visiter régulièrement, elle m’achetait la bière Simba auprès de l’épouse du citoyen Kasongo, Conseiller à la coordination catholique dont la résidence était située dans l’enceinte de l’école Amani.
Le soir du 20 mai 1987, elle venait à peine de me quitter, quand il m’avait été rapporté que ma détention au cachot de l’état major de la 13ème brigade des FAZ, située sous les escaliers de la résidence Isabelle avait prit fin. Je la rejoignis chez mon neveu Imbwembwe et commençai dès le lendemain les démarches pour regagner mon village d’origine de Kayanza.
Voulant rencontrer le Commissaire sous régional à son bureau, il m’avait été dit qu’il n’était pas présent à Kalemie et avais été dirigé chez son assistant qui ne me permit pas de quitter Kalemie, car il n’avait pas encore des précisions sur ma destination qui ne serait pas Kongolo avant Lubumbashi, avait-t-il affirmé.
Habitué à des voltes face du pouvoir, je profitai de mon temps de liberté pour répondre aux invitations de certains frères et pour faire les démarches de rentrer en possession de mon immeuble de Kongolo.
Deux invitations aux dîners m’avaient été adressées respectivement par Tabu de la cité de Kapulo dans les environs de quatre coins et par Lwamba Ngulimba chargé des approvisionnements à Filtisaf.
Tabu était homme d’affaires et voyageait régulièrement vers Kinshasa. Originaire de Kayanza, il avait la garde sur le jeune Michel, fils d’André Mbungu qui me visitait à l’agence nationale de documentation.
En nous apprêtant à longer l’avenue Katanga-Kivu pour rejoindre le lieu de rendez-vous nous vîmes un véhicule de l’Office de Route s’arrêter. Ses occupants étaient l’ingénieur Shukuru et son épouse, notre parente José qui nous saluèrent sans crainte contrairement aux jours antérieurs.
A la résidence de Tabu plusieurs personnes dont Kiabwe de la localité Katambwe nous avaient présenté leurs sympathies.
Lwamba lwa Ngulimba Justin, qui nous avait aussi invités était une vieille connaissance de l’internat à l’école primaire régionale de Sola, où avant son baptême nous l’appelions Maongezo. Il était aussi parent de mon épouse.
Pour les retrouvailles, nous avions vidé à deux toute une bouteille bande rouge de Johnie Walker 72 cl. Il nous avait remis à Kamukolobondo en voiture tard la nuit, en état d’ébriété. J’avais beaucoup vomi et faillis tomber dans le fût mal couvert qui servait de toilette.
Ainsi donc, deux mois après le décès du fondateur Anaclet Makanda, je n’avais pas voulu devenir un martyr anonyme, ni effrayer les autres fondateurs, alors que la grande partie de la population avait très peur d’affronter le pouvoir et encore besoin d’un encadrement politique. Je m’étais désengagé seul et non comme on voulait que nous le fassions tous à Gbadolite au nom du parti. Pour moi, le parti devait continuer son existence pour le triomphe de la démocratie et le progrès social : « La phrase du capitaine S1 SAFARI me revenait tout le temps à l’esprit, « au niveau où vous êtes arrivé, devenez plutôt un héros au lieu de mourir martyr, s’il vous arrivait de mourir maintenant ici à Kalemie vous ne serez malheureusement qu’un martyr anonyme !”